La plongée nord-américaine (PADI, SSI, etc.).
Par Webmaster le 6 mars 2021.

La plongée nord-américaine
La plongée nord-américaine... de loisir.

La plongée nord-américaine, beaucoup en parlent, mais peu la connaissent réellement.

Par plongée nord-américaine, on fait référence aux plongeurs formés par les célèbres agences d’outre-atlantique que sont PADI, SSI, NAUI, SDI et quelques autres encore. Les principales agences de plongée nord-américaines se sont regroupées pour fonder le RSTC (Recreational Scuba Training Council) qui définit les standards minimaux que devront respecter les organisations affiliées. Le RSTC a permis au système US de largement dominer le marché mondial de la plongée et d’être présent aux quatre coins de la planète. Cette domination mondiale, associée à une réputation de plongée facile, a valu de nombreuses critiques et beaucoup de dénigrement des écoles US dans notre pays.

Devant l’offre importante de formation proposée par les différentes enseignes de plongée, le néophyte se retournera naturellement vers le net pour essayer de trouver des réponses afin de l’aider dans son choix. Après quelques recherches, notre butineur ne tardera pas longtemps à trouver des analyses comparatives entre les cursus des écoles françaises et nord-américaines.

Les agences de plongée
Les agences de plongée.

Ces pseudo-études portent généralement sur les cursus dits de « loisir » et concluent fréquemment en faveur de l’approche française souvent qualifiée de plus sérieuse, plus complète et autorisant une plongée profonde avec paliers de décompression en opposition aux agences d’outre-atlantique qui se contentent d’une plongée facile, limitée à 40 mètres et sans palier (obligatoire) de décompression.

Au regard de ces conclusions on ne peut que regretter que les auteurs n’aient pas pris le temps de chercher un peu plus loin que le seuil de leur porte. Et pourtant comme notre futur plongeur en recherche d’information, il n’est, aujourd’hui, pas très compliqué de trouver toute la matière qui nous permettra de comprendre la philosophie ainsi que les objectifs visés par les agences de formation que ce soit d’un côté comme de l’autre de l’Atlantique.

Comme dans l’hexagone, la plupart des organisations étrangères de plongée disposent de deux cursus, un loisir et l’autre technique. Tout le monde connaît le premier (mais essentiellement dans sa propre chapelle) mais beaucoup moins bien le second. Il est bon de savoir que le cursus de formation dit « technique » que l’on retrouve chez nous est une reprise et adaptation de ce qui a été inventée par l’école nord-américaine. Savoir que les programmes de formation sont découpés en deux cursus n’a cependant aucune valeur si l’on ne connaît pas la signification que peuvent avoir ces termes (loisir VS technique) pour chaque protagoniste. Ne pas comprendre l’ensemble du modèle revient tout simplement à comparer des choux et des navets ou encore une Porche 911 avec une Renault Clio.

Avant d’entrer plus loin dans le détail, nous pouvons essayer de comprendre la philosophie qui a guidé chacune des organisations pour déployer leur programme. Pour cela rien de mieux que de faire un rapide point sur la population actuelle de plongeurs. Dans ce domaine, les dernières études réalisées en France nous donnent les chiffres suivants : 64 % de niveaux 1, 24% de niveaux 2 et 11% de niveaux 3. Le 1% manquant pour atteindre les 100% a été perdu dans les arrondis par défaut. On apprend aussi, sans grande surprise, que l’essentiel des plongées dans le monde, et de même en France, se fait principalement dans la courbe de sécurité et avec une profondeur moyenne ne dépassant pas les 20 mètres. Cette dernière information semble tout à fait cohérente au vu des chiffres présentés précédemment qui nous montrent que les niveaux 1 et 2 représentent 85% de la population des palmipèdes.

La plongée loisir
Une population (mondiale) de plongeurs essentiellement loisir.

Cela veut également dire que les agences américaines ne se sont pas trompées en concentrant leurs efforts sur les premiers niveaux de plongeurs et principalement pour une plongée récréative. Dis autrement nous évoluons dans un domaine purement loisir.

En effet, ce qui différencie les cursus de formation nord-américains du nôtre est qu’ils ont fait le choix de scinder leur offre en 2 parties bien distinctes avec une frontière clairement établie. L’apprentissage se doit, avant tout, d’être ludique et attrayant dès les premières plongées avec une alternance de cours techniques suivie par d’autres plus orientés sur la découverte du milieu. N’oublions pas que la formation nord-américaine est un produit commercial qui a pour objectif de faire vivre l’instructeur ainsi que l’entreprise. Dans n’importe quelle école de commerce on vous apprend à définir avec précision les besoins du client, ce que les Américains n’ont pas omis de faire. L’objectif est de conserver et de fidéliser la clientèle pour que l’activité soit pérenne et rentable. Ceci explique pourquoi les écoles d’outre-atlantique ont fait le choix d’une plongée facile/ludique avec accès direct vers la surface. Cette définition ne veut pas dire pour autant que la sécurité des élèves ait été négligée, loin de là. La pratique de la plongée a été adaptée à une population qui recherche avant tout le plaisir simple de la découverte au contraire du cursus français plus orienté sur la profondeur et la performance. Malheureusement, ces derniers critères ne sont pas en tête de liste pour la très grande majorité des plongeurs.

Pour les candidats expérimentés ou qui recherche une plongée plus engagée les écoles RSTC ont déployé un cursus technique qui se rapproche plus de notre vision sportive de l’activité.
En effet, la partie invisible, incluant la plongée avec paliers et la plongée profonde à l’air, qui semble faire défaut au cursus de l’oncle Sam ne se trouve pas dans la branche loisir, mais dans la suivante. Quelles que soient les écoles d’outre-atlantique le découpage et la philosophie est similaire même si les contenus peuvent varier et présenter de notables différences.
Cela veut dire que si l’on souhaite trouver l’équivalent de l’offre française du niveau 1 au niveau 3, il faudra aussi aller piocher au-delà que dans la simple branche récréative. En fait, le niveau 3 n’a pas d’équivalent dans le cursus loisir nord-américain. Pour les agences US, la plongée avec palier de décompression obligatoire et au-delà des 40 mètres est une composante de la branche technique. Ces 2 critères définissent d’ailleurs la frontière entre le loisir et la technique.

Tec Deep Diver PADI
De l'autre côté de l'atlantique la plongée avec décompression et au-delà des 40m entre dans le domaine technique.

De son côté, la formation française d’autonome (N3) se veut très (trop) simple et dans le strict prolongement du niveau 2. Cela signifie que le contenu portera principalement sur l’adaptation à la profondeur et sur l’autonomie à 40 mètres, rien de plus. Malheureusement, le niveau 3 est un autonome à 60 mètres et non 40. Depuis la création du diplôme de plongeur autonome (devenu niveau 3 par la suite) en 1982, les techniques de plongée dans l’espace sub-lointain (>40m) ont bien évoluées, mais pas la formation du plongeur. Ce point est un des principaux défauts du programme français d’apprentissage à la plongée profonde à l’air. Aucune réelle plus-value n’est apportée par rapport au niveau 2. La formation de niveau 3 Français est une bonne approche de la plongée avec décompression dans l'espace 0-40 mètres, mais moins pour aller au-delà ou pour être plus précis, plus au goût du jour.

Cette carence dans la formation à la plongée profonde est accentuée par un saut important que l'on peut constater dans les profondeurs d'évolution vers l'autonomie. Un niveau 2 fraîchement breveté passe d'une autonomie de 20 à 60 mètres (niveau 3) du jour au lendemain. Une véritable autonomie à 40 suivie d'une progression plus qualitative et technique comme pratiqué par de nombreuses agences étrangères aurait certainement été bénéfique. Il y a bien le PA40, mais qui reste une certification purement franco-française sans aucune équivalence CMAS et qui de plus, en termes de formation, est identique (au pouième prés) au niveau 3, car comme ce dernier les exercices sont réalisés à 40 mètres. Le PA40 n'est réellement différent que dans ses prérogatives réduites. Cela signifie, qu'à l'heure actuelle, nous avons un quasi-doublon qui se distingue uniquement par un nom différent.

Dans le cadre de la formation en plongée profonde à l’air du cursus US, on retrouvera tous les ingrédients spécifiques à la branche technique (française ou US) que ce soit du point du vue matériel (utilisation du bi-bouteille comme du mono, de la wing, du parachute avec dévidoir, du bloc de déco, etc.) mais aussi théorique (principe du what if, planification avancée avec logiciel, optimisation de la déco, objectif de la redondance, psychologie de la plongée profonde, etc.). Tous ces éléments ne sont disponibles dans le programme français qu’à partir du module trimix normoxique. Malheureusement, il existe beaucoup de techniques enseignées dans ce cours qui pourraient être directement exploitables pour la plongée profonde à l’air. De ce point de vue, le programme nord-américain pour la plongée profonde à l’air est bien plus performant et surtout plus cohérent que notre simple formation de plongeur autonome à 40 et 60 mètres.

À titre d’information et pour avoir une autre vision de la plongée profonde, nous pouvons regarder ce qui se fait dans les écoles voisines affiliées à la CMAS que ce soit en Belgique à la LIFRAS (Ligue Francophone des Activités Subaquatiques) ou encore au Royaume-Uni avec le BSAC (British Sub-Aqua Club). Ces 2 organisations se rapprochent des recommandations de la CMAS maison mère pour une plongée loisir à l’air limitée à une profondeur de 40 mètres, dans le cadre du cycle normal de formation (de CMAS 1 à 3*). Pour accéder à une plongée avec décompression ou plus profonde la première propose un brevet de spécialisation PPA (Plongée Profonde à l’Air) et la seconde recommande de suivre des cours spécifiques disponibles dans le cursus TEC comme pour les agences nord-américaines. Ces cours s’appellent « ACCELERATED DECO PROCEDURES » et « SPORTS MIXED GAS DIVER » et permettent de faire de la plongée avec décompression en utilisant des mélanges nitrox (dans la limite des prérogatives du brevet de plongeur) ou encore de descendre à 50 mètres avec un trimix léger. Cependant, pour des raisons historiques, un Dive Leader (et +) BSAC peut évoluer jusqu’à 50 mètres à l’air uniquement. À noter, que le BSAC intègre, depuis 2007, le nitrox directement dans ses formations de plongeur dès le premier niveau Ocean Diver. Un nouveau plongeur qui intègre le BSAC doit obligatoirement passer par le Nitrox Workshop s'il n'est pas qualifié pour plonger avec un mélange suroxygéné.

Le BSAC est certainement une des meilleures écoles de plongée. Son cursus est l'un des plus complets et peut même paraître relativement complexe avec de nombreuses étapes de progression. Mais cela s'explique par les conditions de plongée difficiles des mers qui bordent les côtes de la Grande-Bretagne (Manche, mer du Nord, océan Atlantique nord). Et pourtant, cette agence privilégie largement l'autonomie (20, 30 et 40 mètres) à toutes les étapes de la formation au contraire de la France qui s'enferme dans un assistanat culturel omniprésent.

Pour la culture ; le BSAC est l'un des membres fondateurs de la CMAS au même titre que la FFESSM, mais a quitté cette dernière en 1997 afin de pouvoir se développer librement à l'étranger. Cette séparation priva cependant les brevets BSAC de l'équivalence CMAS. Mais cela resta de courte durée, car le BSAC retrouva cet avantage en 2003 au travers d'une autre organisation britannique, la SAA (Sub Aqua Association) membre de la CMAS.

Au même titre que beaucoup d'écoles, on peut noter que pour la CMAS Suisse la limite de la plongée loisir à l’air est également à 40 mètres même si il n’y à pas d’interdiction formelle pour aller au-delà.

Dans tous les cas, on constate qu’il y a une très grande hétérogénéité dans le système CMAS et qu'il n'existe aucune démarche commune à toutes les écoles affiliées. La France reste cependant l’une des rares fédérations à toujours proposer officiellement une plongée profonde à l’air au-delà des 40m avec une formation au strict nécessaire. Aucun apport supplémentaire à l’horizon pour améliorer la sécurité dans cet espace. On peut d'ailleurs remarquer que la fédération délégataire n'a jamais fait de réels efforts pour développer le nitrox en France.

Nous pouvons signaler que la CMAS a développé une formation à la plongée profonde reprise de celle proposée par l'école nord-américaine et qui s'appelle "Extended Range Nitrox". Relativement récente, cette dernière est peu déployée au niveau des fédérations nationales qui ne souhaitent peut-ètre pas remettre en cause des cursus établis depuis longtemps. En 2023, cette dernière a été remplacée par le module "CMAS ACCELERATED DECOMPRESSION DIVER" qui en reprend les principaux ingrédients. Les écoles CMAS Suisses et Britanniques se rapprochent tout de même de la confédération avec son plongeur CMAS 2* qui a des prérogatives de plongeur autonome à 30 ou 40 mètres suivant formation. Reste à proposer pour les fédérations nationales une vraie formation à la plongée profonde (Extended Range) sans aller obligatoirement imposer un passage par le plongeur 3* qui est plutôt une formation de guide.

Mise à jour octobre 2024 :
Trois ans après la rédaction de cet article, on peut lire dans le procès-verbal du CDN (Comité Directeur National de la FFESSM) n°500 (point n°12.3) de février 2024, que l'élite fédérale semble découvrir que la France reste l'un des rares pays au monde à plonger (uniquement) à l'air au-delà des 40 mètres.
Conscient que cette pratique ne pourra pas durer éternellement, la fine fleur de la plongée française semble contrainte d'admettre qu'une évolution des pratiques devient nécessaire. Dans le CR du CDN, les propos du président de la Commission technique Nationale sont éloquents "Adapter nos cursus pour les rendre plus cohérents avec les évolutions techniques et matérielles, mais aussi avec les nouvelles connaissances théoriques. Notre problématique est donc de rajeunir, féminiser et moderniser notre pratique."
Avant de procéder à une évolution du cursus des plongeurs, il faudra cependant et avant tout passer par une étape de réactualisation des connaissances et sûrement des mentalités des moniteurs. L'année 2025, verra le jour d'un nouveau brevet pour les moniteurs, le BEPPA (Brevet d’Enseignement de la Plongée Profonde à l’Air).
Peut-on espérer dans un proche avenir, une évolution des contenus de formation du niveau 3 ?
Quel serait l'intérêt (d'essayer) de faire évoluer les moniteurs si ce n'est pour en faire profiter les plongeurs ?
Comme bien souvent à la FFESSM, l'évolution des mentalités comme les réformes prennent du temps, beaucoup (trop) de temps. Nos lecteurs ont compris, nous devrons patienter encore de longues années !

Pour résumer, le cursus loisir nord-américain trouve plutôt son équivalence dans les niveaux 1 et 2 du système français (excluant la plongée avec palier de décompression obligatoire). Le niveau 3 Français trouvera son homologue ou ce qui s’en apparente dans le cursus technique de la plongée US. Si vous désirez avoir une vision synthétique plus détaillée, vous pouvez vous rendre sur le site recycleur.free.fr. Vous y retrouverez un tableau comparatif récapitulatif des cursus français VS US.

Au vu des études qui nous apprennent que la population des plongeurs se limite majoritairement à une plongée simple et contemplative plus qu’à une plongée sportive, on peut affirmer que les agences nord-américaines ont fait le bon choix en matière de stratégie et d’enseignement de la plongée. De son côté le cursus français qui a une approche unique et trop exclusive n’a que très peu évolué depuis ses débuts alors que la population a profondément changé, moins sportive et de plus en plus âgée. De nos jours, la plongée est d’ailleurs perçue comme une activité de détente et non pas comme un sport. Les écoles US ont su développer intelligemment ce créneau sans délaisser celui des plongeurs sportifs puis techniques.

Extrait de la revue Subaqua N°290 de juin 2020. La répartition actuelle des générations de plongeurs a été décortiquée sur une periode de 36 ans (de 1982 à 2018). En 1982, prés de 70 % des plongeurs avaient entre 21 et 40 ans. En 2018, ce chiffre a été divisé quasiment par deux. Dans le même temps, la tranche des 41-60 ans a doublé, passant de 20 % en 1982 à 40% en 2018. Quant à la catégorie des plongeurs de 61 ans et plus, presque inexistante en 1982, affiche actuellement un conséquent 15 %.

Et pour terminer, cette mauvaise connaissance de nos compatriotes pour le cursus nord-américain n’est pas vraiment étonnante, car il ne faut pas oublier que le Code Du Sport ne reconnaît que les certifications françaises et CMAS. Cela signifie que les plongeurs de formation technique nord-américaine ne plongent tout simplement pas en France. Si vous souhaitez croiser ces bêtes rares, il faudra aller tremper vos palmes en Belgique, en Italie, en Espagne. Bref partout… sauf en France. Tout ceci explique aussi pourquoi les agences nord-américaines ne déploient pas beaucoup d’énergie à promouvoir leur cursus autre que purement loisir en France hormis les écoles comme TDI et IANTD qui ont une orientation principalement technique.

Pour aller plus loin et découvrir plus en détail le cursus nord-américain, je vous invite à lire l’article « Le cursus loisir nord-américain » sur le site recycleur.free.fr.